Dans un arrêt rendu le 4 octobre 2024, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a clarifié les conditions dans lesquelles les autorités policières peuvent accéder aux données personnelles contenues dans un téléphone portable lors d’une enquête pénale. Cet arrêt fait suite à une question préjudicielle relative à la législation de l’accès aux données dans le cadre d’enquêtes criminelles. Il soulève des questions fondamentales sur l’équilibre entre les besoins des enquêtes et la protection des droits fondamentaux des individus.
Une ingérence grave dans la vie privée
La CJUE reconnaît que l’accès à l’ensemble des données contenues dans un téléphone portable représente une ingérence particulièrement grave dans les droits fondamentaux au respect de la vie privée et à la protection des données personnelles. Ces données peuvent inclure des informations extrêmement sensibles telles que des messages privés, des photos ou des historiques de navigation sur internet. De plus, ces informations permettent de tirer des conclusions précises sur la vie privée d’une personne.
Proportionnalité de l’accès aux données
La Cour précise que pour que cet accès soit légitime, il doit respecter le principe de proportionnalité. La gravité de l’infraction faisant l’objet de l’enquête est un élément clé dans l’évaluation de cette proportionnalité. Cependant, la Cour a refusé de restreindre cet accès uniquement aux infractions de criminalité grave, soulignant que cela pourrait nuire à l’efficacité des enquêtes dans des infractions moins graves et augmenter le risque d’impunité.
Encadrement légal de l’accès
L’arrêt souligne que toute ingérence dans la vie privée doit être précisément encadrée par la loi. Il incombe aux législations nationales de définir avec précision les infractions pour lesquelles l’accès à de telles données peut être justifié. Le législateur national doit également garantir que l’accès aux données est soumis à un contrôle préalable par une autorité judiciaire ou administrative indépendante, sauf en cas d’urgence dûment justifiée.
Contrôle et transparence
Un contrôle préalable par une autorité indépendante est crucial pour garantir un juste équilibre entre les besoins des enquêtes et la protection des droits fondamentaux. Enfin, la personne concernée doit être informée des motifs de l’accès à ses données dès que cette communication ne compromet plus l’enquête.
En conclusion
L’accès par la police, dans le cadre d’une enquête pénale, aux données personnelles conservées sur un téléphone portable peut constituer une ingérence grave, voire particulièrement grave, dans les droits fondamentaux de la personne concernée. Néanmoins, il n’est pas nécessairement limité à la lutte contre la criminalité grave. Le législateur national doit définir les éléments à prendre en compte pour un tel accès, tels que la nature ou les catégories des infractions concernées. Afin d’assurer le respect du principe de proportionnalité dans chaque cas concret, dont l’examen implique une pondération de l’ensemble des éléments pertinents du cas d’espèce, cet accès doit, de plus, être subordonné à une autorisation préalable par une juridiction ou une autorité indépendante, sauf dans un cas d’urgence dûment justifié.
La personne concernée doit être informée des motifs de l’autorisation dès que la communication de cette information n’est plus susceptible de compromettre les enquêtes.